Après le pangolin : quelles tendances en 2021 pour le secteur financier ?

Cette année 2020 s’achève, il était temps. Personne n’avait anticipé qu’une sombre histoire de Pangolin précipiterait le monde dans une crise inédite. Mes prévisions de l’année dernière, focalisées sur l’asset management et la banque privée étaient donc à côté de la plaque. Je me console en me disant que je n’étais pas le seul dans ce cas.

Tout le monde attend la fin de la crise courant de l’année prochaine grâce notamment à la campagne de vaccination. Alors à quoi le secteur financier peut-il s’attendre pour 2021, année d’un retour progressif à la normale et du rebond de l’économie ?  J’identifie 8 grandes tendances, en germe parfois depuis des années. Ces grandes tendances pourraient être des thèmes majeurs pour l’industrie financière et accélérer la transformation du secteur.

1/ La fin des rétrocessions se précise

La Commission Européenne a relancé le débat sur le bien-fondé des rétrocessions et pourrait bien les interdire malgré l’opposition résolue de l’industrie, l’EFAMA en tête. Ce serait l’opportunité de réduire le coût des produits pour les clients dans un environnement de taux bas pesant sur les rendements et d’accélérer la bascule vers les ETFs. Si la Commission adoptait cette orientation, les banques et assureurs devront complètement revoir leur modèle et faire peser le coût du conseil sur le client. Certains comme Société Générale commencent à anticiper avec la mise en place d’une offre de conseil payante et l’internalisation des gestions externes via une SICAV maison. C’est une manière  intelligente de protéger ses marges en éliminant au passage les rétrocessions.

2/ L’empreinte carbone devient le nouvel indicateur clé de performance

Je ne vais pas revenir sur la montée en puissance de la finance verte, tout le monde en parle et tous les acteurs du secteur multiplient les engagements plus ou moins sérieux. On parle moins en revanche de la révision de la directive NFRD. Dès le 1er trimestre 2021 si le processus de revue tient les délais, les entreprises de plus de 500 employés (250 employés selon de récentes déclarations de Emmanuel Macron), devront déclarer leurs émissions de GES pour les scopes 1, 2 mais aussi 3 et prendre des engagements chiffrés de réduction de l’empreinte carbone. C’est un game-changer car désormais, la transparence sera faite sur l’impact réel des activités sur le changement climatique (le scope 3 est le principal contributeur et de loin pour la plupart des entreprises). Les établissements financiers pourront par exemple adapter leur stratégie d’investissement ou de financement selon le bilan GES global devenu public de leurs  grands clients institutionnels. Il sera également nécessaire de piloter les émissions de GES indirectes dans le temps avec comme objectif de réduire drastiquement le financement des activités carbonées.

3/ Les cryptos s’imposent comme une nouvelle classe d’actifs majeure

Les cryptos ont tiré leur épingle du jeu en 2020. Le bitcoin a vu son cours tripler en 2020 avec un pic à 27000 USD et des plateformes de paiements comme Paypal ou des néobanques comme Revolut développent leur offre autour des cryptos. 2021 pourrait être l’année de la confirmation et celle de l’accélération de l’adoption des cryptos par le grand public. Reste désormais à aller au-delà du paiement ou de la simple spéculation et à proposer de manière large d’autres services clés : produits d’épargne, ICOs et crédit. Le développement de solutions décentralisées de type DeFI pourrait s’accélérer pour offrir une gamme de services plus large à des conditions bien plus compétitives que leurs équivalents monétaires classiques.

4/ Les marchés actions poursuivent leur irrésistible ascension

Après la crise sanitaire les marchés action ont peu à peu remonté la pente. Les marchés actions aux Etats-Unis battent des records et l’Europe a finalement limité les dégâts. Malgré les craintes de certains comme l’ESMA, de nombreux gérants restent optimistes. En effet, bes banques centrales ont inondé le marché de liquidités, poussant les valorisations à la hausse. Le différentiel de rendement par rapport aux produits sans risque (à taux négatif !) est en effet très attractif. Avec le rebond de l’économie et la mobilisation des milliards d’épargne accumulés durant la pandémie, les entreprises bien gérées et bien positionnées vont retrouver un niveau de profitabilité normal. De quoi accélérer la transition des Français de l’épargne sans risque vers l’épargne financière ? Le mouvement est en tous cas bien avancé sur l’assurance-vie, avec 34% des versements réalisés cette année en UC.

5/ Le mouvement de concentration des Fintechs et des néobanques s’accélère

Certaines Fintechs se sont faites peur cette année, la crise ayant réduit la traction des néobanques en début d’année. Les choses semblent néanmoins rentrer dans l’ordre et les Fintechs les plus performantes multiplient les levées de fonds : 104 millions pour Qonto, 70 millions pour Swile ou 50 millions pour Alan. Peu à peu, les gagnants commencent à émerger, avec des moyens financiers permettant de distancer la concurrence. On devrait ainsi voir un certains nombre d’acteurs à court de cash s’adosser aux leaders du secteur. Le soutien de l’Etat à l’économie suite au COVID-19 a peut-être ralenti une tendance qui ne fera que s’accélérer à partir de l’année prochaine. Une flopée de licornes pourrait bien émerger de la crise.

6/ Le Brexit a bien eu lieu et puis… rien

Après des années de crises et de psychodrames, le Brexit a enfin eu lieu avec un accord arraché in extremis. On évite le gouffre d’un hard Brexit sans accord, le début d’année pourrait s’avérer plus serein. Mais le Brexit est au final un non-événement pour la sphère financière qui s’est préparée depuis plusieurs années. Les banques américaines ont accéléré les transferts d’actifs vers le continent, Goldman a établi sa plateforme d’exécution à Paris et les mouvements devraient se multiplier à l’avenir. Peu à peu et sans faire de bruit, une partie de l’activité basée dans la City sera transférée sur le continent avec l’émergence d’une concurrence mieux implantée localement pour les banques de l’UE.

7/ Les banques américaines continent à creuser l’écart

Les banques américaines ont de nouveau montré la résilience de leur modèle, notamment dans la BFI. Le retour sur capitaux propres est 2 fois plus élevé pour les établissements américains qui creusent un peu plus l’écart avec les banques européennes, celles-ci réduisant la voilure pour préserver leur bilan. Le Brexit pourrait également avoir une conséquence inattendue : renforcer la présence locale des JP Morgan ou Goldman Sachs et leur donner un bien meilleur accès aux clients institutionnels locaux. Résultat, les banques américaines vont reprendre plans de rachats d’actions mais aussi acquisitions majeures afin de pousser un peu plus leur avantage. JP Morgan cherche ainsi une acquisition transformante dans l’Asset Management, la Banque Privée ou les Fintechs.

8/ L’attaque des bots est pour demain

On en parle (et j’en parle) depuis des années mais promis juré, 2021 sera l’année des chatbots. Certains acteurs comme BNP Paribas développent patiemment les capacités de leur bot maison, d’autres comme Zelf développent une banque disponible uniquement via chat. Il suffit de voir au quotidien les millions de personnes communiquant uniquement par messagerie, les bots sont l’avenir de la relation client. C’est une démarche ambitieuse et complexe, le bot devant acquérir une personnalité afin de séduire les utilisateurs. Mais l’impact sur la satisfaction client, pour un coût contenu, peut être énorme. D’ailleurs, même Headlink s’y met avec Hector notre Chatbot (vous pouvez lui dire bonjour sur cette page ♥).